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Quelles sont les règles de l’usage privatif des parties communes en copropriété ?
Rédigé par Agathe CATHALA le 29 avril 2024
Relu et validé par Alexandre BERGES
En copropriété, les parties communes concernent les espaces dont tous les copropriétaires ont la propriété et l’usage. Dans certains cas, la jouissance d’une partie commune est réservée à l’occupant d’un seul logement : on parle alors de partie commune à usage privatif.
Qu’est-ce qu’une partie commune à usage privatif ?
Une partie commune à usage privatif, comme les parties communes partagées, appartiennent à tous les copropriétaires, à la différence qu’un seul d’entre eux en a la jouissance exclusive, même s’il n’en est pas l’unique propriétaire. S’il s’agit donc d’un droit d’usage exclusif – le copropriétaire est le seul à bénéficier de cette partie, ce n’est cependant pas un droit de propriété : la nature de la partie reste commune à la copropriété.
Depuis la loi Élan du 23 novembre 2018, ce droit de jouissance privative est rattaché à un lot de copropriété, puisque les parties concernées y sont la plupart du temps attenantes : « le droit de jouissance privative est nécessairement accessoire au lot de copropriété auquel il est attaché » (article 6-3, alinéa 1). Cela implique que cet usage privatif est automatiquement transmis avec son lot au nouvel acquéreur en cas de vente, ou aux héritiers en cas de décès du copropriétaire. Une fois qu’un copropriétaire bénéficie de ce droit de jouissance, il n’est plus possible de le remettre en cause sans son accord ainsi qu’un vote en assemblée de copropriétaires, à condition que les parties privatives soient mentionnées dans le règlement de copropriété.
Quelles sont les parties communes pouvant être concernées par un usage privatif ?
Le plus souvent, les parties communes à usage privatif sont attenantes à un lot de copropriété. On retrouve donc des endroits tels que :
- balcon
- terrasse
- cour d’immeuble
- jardin
- couloir
- loggia
- combles
Comment est réparti le coût d’entretien d’une partie commune à usage privatif ?
Dans la mesure où les parties communes à usage privatif sont inscrites et détaillées dans le règlement de copropriété, c’est celui-ci qui détaille les coûts d’entretien de ces parties précises. Il y a donc deux cas de figure :
- Si le règlement ne prévoit pas de charges supplémentaires pour le propriétaire bénéficiant de ces parties privatives, c’est à lui de prendre à sa charge tous les travaux d’entretien des parties qui le concernent ;
- Si le règlement détaille les charges relatives au droit de jouissance exclusif, le copropriétaire bénéficiaire se voit attribuer une quote-part de charge supplémentaire pour l’entretien de cette partie.
Comment demander la jouissance exclusive d’une partie commune ?
Techniquement, tous les copropriétaires peuvent formuler une demande de jouissance exclusive d’accès à certaines parties communes si jamais ce n’est pas déjà défini en amont par le règlement de copropriété. Attention cependant à bien suivre les étapes pour demander la jouissance d’une partie commune :
- Faire la demande en assemblée générale des copropriétaires en inscrivant le projet à l’ordre du jour de la réunion ;
- Veiller à ce que la demande soit recevable : en général, la partie commune dont le copropriétaire souhaite avoir la jouissance doit soit être attenante à son lot de copropriété, soit être très peu utilisée par les autres copropriétaires ;
- C’est la réunion de copropriétaires qui permettra de valider ou non la demande par un système de vote, soit à la majorité absolue, soit à la double majorité si des travaux modifiant les parties communes en profondeur sont envisagés ;
- Pour que la jouissance exclusive soit actée, il faut modifier le règlement de copropriété pour y intégrer définitivement cette nouvelle clause (Loi Elan, article 6-4 “l’existence des parties communes spéciales et de celles à jouissance privative est subordonnée à leur mention expresse dans le règlement de copropriété”).
Peut-on utiliser une partie commune à usage privatif comme bon nous semble ?
Même si un des copropriétaires dispose d’un droit de jouissance exclusif d’une partie commune, il n’en a pas pour autant la propriété exclusive. En d’autres termes, il ne peut pas prendre seul n’importe quelle décision concernant cette partie. Concrètement, il peut effectuer de petits aménagements ou travaux ou y apporter des éléments amovibles sans demander l’accord des autres copropriétaires, mais pas de gros travaux. Dans ce cas précis, la décision revient à l’ensemble des copropriétaires lors d’une assemblée générale. On distingue là encore plusieurs cas :
- Si les travaux sont simples, il suffit de l’accord des copropriétaires ;
- Si les travaux sont de nature à modifier l’aspect extérieur de l’immeuble, leur réalisation doit être actée par un vote à la majorité absolue ;
- Si les travaux modifient en profondeur les parties communes, ils doivent être validés par un vote à la double majorité (exemple : terrassement, véranda…) ;
- Selon l’ampleur des travaux, une autorisation du service d’urbanisme de la ville sera de rigueur.
Dans tous les cas, il est important de garder en tête que l’usage d’une partie commune, même lors d’un cas de jouissance exclusif, doit rester conforme à la destination de l’immeuble et ne doit pas porter atteinte aux droits des autres copropriétaires.
Exemple
Un jardin ne peut pas être transformé en parking, et les parties communes privatives ne doivent pas être source de nuisances, quelles qu’elles soient, pour le voisinage.
Par ailleurs, même si un seul copropriétaire dispose de l’usage privatif d’une partie commune, le syndic peut décider d’engager des travaux sur cette partie. Cependant, hors situation d’urgence telle que la sécurité des occupants ou la conservation des biens, il est dans l’obligation d’informer le copropriétaire concerné dans un délai raisonnable, et obtenir son accord avant d’autoriser le lancement des travaux et permettre aux artisans d’accéder à la partie commune concernée.
Que faire en cas de contentieux ?
Partant du principe que les parties communes à usage privatif sont actées dans le règlement de copropriété, c’est celui-ci qui doit faire foi. En cas de contentieux, la Cour de cassation précise d’ailleurs que les juges sont tenus de s’y référer, d’où l’importance de faire ajouter ce droit de jouissance exclusive au règlement dès le vote validé par l’assemblée générale des copropriétaires. Cet usage privatif peut être remis en question par les autres copropriétaires et débattu en assemblée, mais pour obtenir une quelconque modification, il faudra obligatoirement obtenir l’accord du copropriétaire concerné.
Il faut également rappeler que si les travaux des parties communes à usage exclusif sont de type entretien, réparation ou indispensables d’une manière générale, il n’est en principe pas possible de s’y opposer, que ce soit par le copropriétaire concerné ou l’ensemble, selon la loi du 10 juillet 1965 (article 9) :
En cas de litige dû à la prise en charge de potentiels dégâts dans les parties communes à usage privatif, il convient d’abord de privilégier le dialogue avec le copropriétaire concerné et d’en référer au syndic de copropriété s’il n’est pas possible de parvenir à un accord, voire au Tribunal de grande instance en cas de conflit insoluble.
À savoir
Lors d’un dégât des eaux, le syndic peut intervenir même dans des espaces privatifs s’il est impossible d’accéder autrement à l’endroit d’où provient la fuite.
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