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Immobilier : le DPE biaisé par la consommation réelle des ménages ?
Rédigé par Elodie FUENTES le 18 janvier 2024
Relu et validé par Alexandre BERGES
Les logements classés A et B ne sont pas si économiques qu’on veut bien nous le dire. C’est tout du moins ce que révèle cette étude sortie le 10 janvier 2024, mettant en exergue la différence entre les chiffres de performance énergétique annoncés par le DPE et la réalité des faits. Et si la consommation des Français aisés n’était pas si exemplaire que ça ?
Pourquoi le DPE n’est pas totalement fiable ?
Le DPE est devenu le point de repère des acheteurs immobiliers en matière de performance énergétique d’un logement. Depuis sa création en 2006, le DPE s’est affiné, pour devenir obligatoire à ce jour, pour toutes les ventes de logements en France. Or, depuis la publication d’une étude du CAE (conseil d’analyse économique) et du Crédit Mutuel Alliance Fédérale, parue le 10 janvier dernier, il n’a pas bonne presse. Cette analyse remet en cause la fiabilité du diagnostic de performance énergétique, malgré sa nouvelle méthode de calcul plus performant, la 3 CL.
Pourquoi un tel revers de la médaille ? D’après le CAE, les ménages doivent être mieux accompagnés et cet état des lieux ne concerne pas nécessairement ceux que l’on croit. Car ce qui surprend le plus dans cette dernière analyse sur le DPE, c’est l’écart réel entre les logements notés A ou B et les habitations les plus énergivores (notées G). Le différentiel de consommation entre les passoires thermiques et les logements très bien notés serait en réalité 6 fois moins important qu’annoncé.
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Les habitudes des ménages pointées du doigt
La première cause responsable de ce constat serait, en effet, le mode de consommation des habitants des logements classés A/B. Si elle s’avère beaucoup plus importante que ce que prévoit le DPE pour cette classe de logements responsables, c’est à cause des habitudes énergétiques de leurs hôtes. La sobriété énergétique, combat du Gouvernement depuis deux ans dans sa quête de décarbonation du pays d’ici 2025, ne prend pas chez tout le monde. En moyenne, l’étude révèle que la consommation d’énergie des annotations A et B devrait être de 83 KWh/m²/an. Or, sur le terrain, les données chiffrées sont bien au-dessus, avec une valeur approximative de 150 KWh/m²/an.
+80 %
La consommation réelle des logements A/B par rapport aux prévisions du DPE.
A contrario, les logements les moins bien notés au diagnostic de performance énergétique sont censés consommer 560 % de plus que les notes A et B. Là encore, les chiffres de cette analyse ne collent pas. Il s’agirait en réalité d’un écart bien moindre, de 86 % de plus « seulement ».
Les petites superficies plus consommatrices que les grandes ?
Deuxième idée reçue déconstruite par le CAE : un logement de grande surface consomme plus qu’une petite superficie. Une fois n’est pas coutume, la différence n’est pas celle qu’on attentait. Proportionnellement, un T1 de 30 m² serait plus gourmand qu’un T4 de 80 m². La raison ? La plupart du temps, seules les pièces à vivre sont chauffées dans les grands logements, contrairement aux studios qui chauffent l’intégralité des m².
Outre la superficie des habitations, le paramètre social et plus particulièrement financier des ménages est aussi responsable. Il s’avère que les foyers les plus aisés surconsomment et ne sont pas regardants sur leurs habitudes. L’aspect économique joue en revanche un rôle non-négligeable dans la consommation d’énergie des ménages les moins fortunés, expliquant aussi pourquoi selon l’étude, les passoires thermiques sont moins énergivores qu’attendues.
+2 %
Le nombre de classes énergétiques supplémentaires correspondant à la consommation réelle des ménages les plus aisés (5%).
Le système de notation du DPE est-il remis en cause ?
Le calcul du DPE est un outil sur lequel le Gouvernement compte pour réduire la note des émissions de gaz à effet de serre provoquées par le secteur du logement. À lui seul, il est responsable de 12 % des émissions de CO² dues aux dépenses énergétiques qu’il engendre.
500 000 rénovations par an sont attendues par l’État pour espérer atteindre ses objectifs de décarbonation d’ici 2 ans. L’interdiction de louer des passoires thermiques, combinée aux aides à la rénovation et à l’obligation récente de l’audit énergétique sur les logements énergivores à la vente, le tout reposant sur les données du DPE, font partie des stratégies pour inciter les propriétaires à améliorer la performance de leur logement. Or, si la fiabilité du DPE est mise à mal, cela risque d’entraver les ambitions écologiques de l’exécutif.
Quant au mécanisme du DPE, bien qu’amélioré depuis sa sortie en 2006, il n’est pas à l’abri d’une révision plus accrue au service de sa fiabilité. Concernant l’accompagnement des ménages dans leurs démarches de vente/achat/rénovation et dans l’interprétation du diagnostic de performance énergétique délivré, il a, par ailleurs, été renforcé et notamment avec l’obligation d’avoir recours à un accompagnateur rénov‘ pour les travaux de rénovation soumis aux aides de l’État. Mais si le système de notation du DPE doit être ajusté en fonction des comportements des Français dans leur manière de consommer leurs ressources d’énergie, il devra passer également par une forme d’éducation à la sobriété.
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